dimanche 11 septembre 2016

Le premier jour du reste de ma vie - La fin de l'insouciance

L'envie d'écrire ne m'a jamais quittée. Ce blog a toujours été pour moi un moyen de partager mes photos que je prenais du plaisir à prendre, mais également d'écrire simplement, chose que j'ai toujours énormément aimé. Il faut admettre qu'il est difficile d'avoir une vie active professionnellement, des occupations sportives (artistiques, familiales, mais encore...) et de tenir un blog à jour très régulièrement : la rigueur n'est pas quelque chose d'acquis pour moi et il est vrai que j'ai eu besoin de mettre un peu le "virtuel" sur pause ces dernières années.

Si aujourd'hui, j'ai décidé de réécrire un article, c'est parce qu'une nouvelle page de ma vie débute et, à vrai dire, j'aurais préféré rester au chapitre précédent. Les hauts et les bas font bien sûr partie de notre quotidien à tous : problèmes au travail, en cours, à la maison, avec nos amis ; mais aussi les imprévus de la vie qui surviennent quand on ne s'y attend pas, les changements de programmes, les inquiétudes, les doutes, les remises en question, toutes ces situations qu'on peut parfois avoir de la peine à surmonter. Les problèmes de santé, aussi...

Il y a de ça un mois, une belle journée d'été, je ne pensais pas qu'elle allait s'avérer être "le début d'une nouvelle vie". En réalité, quand on n'a même pas 24 ans, on réalise que oui, la vie peut être dure, incompréhensible, injuste, douloureuse, mais on ne s'imagine pas réellement que nous sommes atteignables et vulnérables.

J'ai pris conscience depuis quelques années à quel point il est important de profiter des moments avec ceux qu'on aime, faire ce qu'on aime, croquer la vie à pleines dents et essayer à tout prix de ne pas avoir de regrets. J'essayais d'appliquer le fameux "on ne vit qu'une fois ("yolo")" ou le "rien ne dure pour toujours ("nothing lasts forever")" au quotidien, mais cette part d'insouciance qui nous suit depuis notre plus jeune âge est tout de même dur à mettre de côté !

On reprend donc à cette fameuse journée d'été, où je sens ma jambe gauche engourdie après une courte sieste dans le train : je me dis, comme la plupart des fois où je ressens une douleur ou quelque chose d'étrange dans mon corps, que ça finira par passer tout seul. Le lendemain, sous la douche, ma peau me fait mal : les éclaboussures d'eau me font l'effet de l'huile qui crépite dans une poêle et nous brûle gentiment la peau - je ne pensais pas aller consulter, mais je me dis qu'il est peut-être plus prudent d'appeler le médecin de garde. L'après-midi même, il m'ausculte sans pouvoir en tirer une conclusion formelle : il faut laisser passer le week-end et en rediscuter lundi.

La nuit du dimanche au lundi, je dors mal et un point sous les côtes droites, au niveau du foie, me donne la nausée. Je n'irai pas travailler ce jour-là, ni le suivant, ma sensibilité cutanée n'ayant pas disparu. Le médecin m'explique qu'afin d'avoir une idée précise de ce qui m'arrive, il va falloir que je passe un IRM (imagerie par résonance magnétique), et pas n'importe lequel : il avait abordé les lombaires, finalement ce sera cérébral + des analyses sanguines pour compléter les tests.

Cinq jours après le début de mes symptômes pour le moment inexplicables, je passe l'IRM cérébral, pour la première fois de ma vie. On m'avait prévenue, heureusement, que ce serait très bruyant (un peu comme en étant sur un chantier routier sans casque de protection, sympathique !) et que ça durerait quand même en tout cas 45 minutes. Autant vous dire que pendant ces longues minutes, j'ai eu le temps de refaire le film de ma vie et que je n'ai pas vraiment réussi à contenir ma peur : des fois, laisser couler les larmes, ça fait du bien aussi... Deux jours après seulement, je retourne chez mon médecin traitant qui lit les résultats juste avant de me les communiquer : à son visage, je vois bien que quelque chose cloche. Le verdict tombe : l'IRM montre clairement des signes d'inflammations au cerveau, qui sont significatives de la sclérose en plaques, avec l'hypersensibilité cutanée que je pouvais ressentir. Je suis également positive à la "maladie de Lyme" (ou des tiques), que l'on peut souvent confondre avec la sclérose en plaques. Après un rapide coup de téléphone à un neurologue, il m'explique qu'il faut débuter les autres analyses dès que possible et que je dois donc tracer un trait sur mes vacances au sud de la France. Ma maman qui m'accompagne ce jour-là semble plus choquée que moi ; personnellement, une phrase de mon médecin résonne en moi : "C'est vrai que c'est un choc, c'est un peu la fin de l'insouciance".


La fin de l'insouciance ? En effet, après avoir passé un long mois à passer de médecin à hôpital, de salle d'attente à salle d'urgences, m'être fait piqué le bras un bien trop grand nombre de fois, avoir passé 2 IRM, découvert la ponction lombaire, eu le plaisir de goûter à nouveau à la perfusion, fait connaissance avec la cortisone par injections trois jours de suite, vu deux neurologues, une bonne dizaine d'infirmières et dû réfléchir à "quel traitement vais-je prendre pour toujours ?", j'ai compris ce que signifiait la fin de l'insouciance.

Les deux neurologues et les nombreuses analyses ont été formels : je suis atteinte, depuis on ne sait combien de temps, d'une sclérose en plaques (SEP), de base incurable et dégénérative.

Dans toute cette "malchance", ces moments où on se demande "pourquoi moi ?", les instants d'angoisse, les peurs, les incompréhensions, le sentiment d'injustice, ces moments aussi où on aimerait en parler mais qu'on n'a pas l'impression de pouvoir être compris, je me suis dit que j'avais de la chance. De la chance parce que ça pourrait être bien pire, parce que je suis en vie, parce que je vis dans un pays bien médicalisé, avec des professionnels efficaces, parce que j'ai accès à un traitement qui, je l'espère, me permettra de stabiliser cette maladie qui fait désormais partie de moi, qui me donnera la chance de vivre "comme avant", de la chance aussi parce que nous sommes en 2016 et que les progrès de la médecine ne cessent d'apparaître...

Je le savais déjà, mais je le comprends encore plus à présent : il faut profiter de chaque instant qui nous est donné de vivre. J'ai envie de sourire, de rester positive, j'ai envie d'avancer, vivre mes rêves, partager des milliers de moments avec ceux que j'aime, profiter de la nature qui m'entoure, me rapprocher de ce qui me fait du bien, trouver une force en moi que je n'aurais jamais cru imaginable. Evidemment, je mentirais si je disais que tout va bien : j'ai peur, j'ai des centaines de questions plein la tête, je me sens seule parfois, j'aimerais que tout redevienne "comme avant", mais je sais à quel point l'esprit est relié au corps et que la pensée positive est extrêmement importante, surtout dans ces cas-là.

Alors, j'ai décidé via certains articles de ce blog, de vous partager mon histoire. Mon quotidien, mes angoisses, mes interrogations, mes ressentis, mes sentiments, mes expériences, tout ce qui pourrait me traverser l'esprit et que j'aurais besoin de "coucher sur papier", où plutôt d'écrire sur la blogosphère.

Avec peut-être un peu de hasard, je trouverai des personnes qui traversent le même genre d'épreuves, qui connaissent cet atterrissage un peu trop brutal, qui ont des proches touchés par une maladie ou qui vivent avec, ou simplement des personnes qui ont envie de partager aussi leurs histoires.

A bientôt, pour de nouvelles aventures ...

2 commentaires:

  1. Hello :)
    Je découvre ton article, en une sur HelloCoton, et il résonne de façon incroyable en moi.
    Je suis aussi atteinte de sclérose en plaques, j'ai été diagnostiquée il y a un an tout pile, à 24 ans. Je suis aujourd'hui sous traitement (Tysabri) et je commence à aller "mieux", mais j'ai eu beaucoup de mal avec l'annonce de cette maladie.
    J'ai toujours aimé écrire également, mais pourtant écrire à ce sujet, c'est tout récent pour moi, et pas encore évident à vrai dire. (en parler, je ne te raconte même pas)
    Je t'admire pour avoir déjà su trouver des mots, et je regrette de ne pas avoir vu de tel article il y a un an. Ne considère pas cela comme de la pub, mais j'ai moi aussi, sur mon blog, décidé de consacrer une petite partie à la SEP désormais. (N'hésites pas à passer, si tu le souhaites.) La raison principale à cela est que j'ai besoin de partage, c'est la seule solution que je trouve pour l'instant à l'acceptation de cette maladie.
    Bref, ce serait un réel plaisir d'échanger avec toi !
    Je n'ai lu que cet article, mais crois-moi, c'est avec enthousiasme que je vais découvrir le reste :)
    Bises,
    Jen
    http://acidcherryy.blogspot.com

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    1. Bonsoir Jen,
      Tout d'abord, un grand merci pour ton commentaire qui m'a beaucoup touchée. Je suis à la fois surprise et rassurée de savoir que cet article a parlé à quelqu'un, mais surtout de me rendre compte réellement que je ne suis pas seule dans cette histoire.
      J'avoue avoir beaucoup de peine également à l'annonce de cette nouvelle page qui débute, j'ai surtout beaucoup de questions et d'appréhensions, mais j'espère de tout mon coeur que le traitement que j'ai commencé m'aidera et que mon corps le supportera. Si on pouvait former une équipe plutôt que de devoir se confronter, ce serait super pour les années qui m'attendent...
      Tu sais, pour moi, écrire a toujours été un échappatoire et j'ai beaucoup plus de facilité à poser les mots "sur papier" que d'en parler. Que ce soit avec mes proches, avec ma famille ou même les infirmières/médecins, je ne réussis pas encore à en discuter. C'est trop récent, trop frais pour que les larmes ne me montent pas aux yeux. Je comprends donc tout à fait que tu aies de la peine encore un an après à en parler, mais je serais ravie d'en discuter avec toi via nos blogs :-)
      Je vais essayer d'être aussi régulière que possible dans la rédaction des articles à ce sujet, j'espère qu'ils te plairont et que cela pourra en aider d'autres, peut-être :-)
      Porte toi bien, prends bien soin de toi et... on va y arriver !
      Bonne soirée,
      E.
      PS : Je vais faire un tour sur ton blog dès que possible pour découvrir à mon tour ton univers :-)

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